Les écrits des Pères Apostoliques - Ignace d'Antioche
Ignace d'Antioche
D'origine syrienne, né vers 35, Ignace fut le troisième évêque d'Antioche, après l'apôtre Pierre et Evode. Il est mort martyr à Rome, probablement en 107 ou 113.
Ignace, qui se donnait le nom de "Théophore" (c'est-à-dire, qui "porte Dieu" en lui), avait été probablement un disciple des apôtres Pierre et Jean.
Ignace fut arrêté par les autorités et transféré à Rome pour être mis à mort dans l'arène, pendant la persécution de Trajan. On espérait ainsi faire un exemple afin de freiner l'expansion du christianisme. Au contraire, il rencontra et encouragea de nombreux chrétiens sur son chemin et il écrivit des lettres aux chrétiens de diverses églises.
Son désir très fort de martyre sanglant dans l'arène peut sembler étrange au lecteur moderne : il conçoit le martyre comme une libation, un sacrifice envers le Christ comme le veut l'Évangile.
On le considère en général comme l'un des Pères apostoliques (les premiers des Pères de l'Église).
Ecrits
Authentiques
Plusieurs lettres nous sont parvenues sous son nom, dont 7 sont aujourd'hui considérées comme authentiques. Il s'agit des lettres aux Éphésiens, aux Magnésiens, Tralliens, Philadelphiens, Smyrniens, et aux Romains, de même que la lettre à Polycarpe, qui selon la tradition était évêque de Smyrne et un disciple de Saint Jean l'Évangéliste.
Pseudépigraphes
Par contre, les lettres aux Tarsiens, Antiochiens, Philippiens, au diacre Héron, à l'apôtre Jean, à la Vierge Marie, ainsi que la correspondance avec la prosélyte Marie, présentes dans les manuscrits offrant la forme « longue » (interpolée) des lettres d'Ignace sont reconnues comme des pseudépigraphes nettement plus tardifs.
Récit du martyre
Quant au récit du Martyre de St Ignace, quoiqu'il ait été abondamment utilisé pour rédiger les « biographies » d'Ignace, il est malheureusement tardif. Les divers anachronismes qu'il comporte ne permettent absolument pas d'y voir un document historiquement fiable : c'est un de ces innombrables "actes de martyrs" où l'imagination du rédacteur supplée au manque d'information.
Théologie de saint Isaac
À partir de ses lettres authentiques, il est possible de brosser un tableau de la pensée théologique d'Ignace.
À titre d'exemple, nous nous bornerons indiquer sa christologie et sa théologie eucharistique.
Tout en affirmant l'Unité de Dieu (Magn 8.2), Ignace évoque la Trinité soit par la formule "le Fils, le Père et l'Esprit" (Magn 13.1) soit "le Christ, le Père et l'Esprit" (Magn 13.2). Le Saint-Esprit est cité à diverses reprises, outre les deux précédentes : Phil "suscr" et 7.1-2, Eph 18.2, Eph 9.1.
Tout en affirmant (contre les docètes) la réalité de la vie humaine de Jésus Christ (Smyrn 4.2, 5.2 ; Eph 7.2, 18.2, 20.2 ; Smyrn 3.1, 4.2, voir aussi Magn 11 ; Trall 9, Smyrn chap 1 à 6), Ignace affirme avec non moins de force sa divinité (Smyrn 1.1 ; Trall 7.1 ; Eph "suscr", 1.1, 15.1, 19.3 ; Rom "suscr", 3.3, 6.3 ; Polyc 3.2, 8.3 ; Magn 6.1, 7.2…)
Sa théologie eucharistique est par ailleurs très précise : Il définit en effet l'eucharistie comme un "remède d'immortalité, un antidote contre la mort" (Eph 20.2) dénonçant aux passage ceux (en l'occurrence des docètes) qui "s'abstiennent de l'Eucharistie parce qu'ils ne veulent pas reconnaître en elle la chair de Jésus Christ" (Smyrn 7.1). Il prévient de ne reconnaître comme "valide que l'eucharistie célébrée sous la présidence de l'évêque ou de son délégué". (Smyrn 8.2 ; voir aussi Philad chap 4)
- Albocicade "la cigale bibliothécaire"
Voici des citations d'Ignace vers 100 ap JC concernant l'unité de l'Esprit en obéissant au pasteur même s'il est plus jeune.
III, 1. Et à vous il convient de ne pas profiter de l'âge de votre évêque, mais par égard à la puissance de Dieu le Père, lui accorder toute vénération ; je sais en effet que vos saints presbytres n'ont pas abusé de la jeunesse qui paraît en lui, mais comme des gens sensés en Dieu, ils se soumettent à lui, non pas à lui, mais au Père de Jésus-Christ, à l'évêque de tous. 2. Par respect pour celui qui nous a aimés, il convient d'obéir sans aucune hypocrisie ; car ce n'est pas seulement cet évêque visible qu'on abuse, mais c'est l'évêque invisible qu'on cherche à tromper. Car dans ce cas, ce n'est pas de chair qu'il s'agit, mais de Dieu qui connaît les choses cachées. (aux Magnésiens)
VIII, 1. Suivez tous l'évêque, comme Jésus-Christ suit son Père, et le presbyterium comme les Apôtres ; quant aux diacres, respectez-les comme la loi de Dieu. Que personne ne fasse, en dehors de l'évêque, rien de ce qui regarde l'église. Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l'évêque ou de celui qu'il en aura chargé. 2. Là où paraît l'évêque, que là soit la communauté, de même que là où est le Christ Jésus, là est l'église catholique. Il n'est pas permis en dehors de l'évêque ni de baptiser, ni de faire l'agape, mais tout ce qu'il approuve, cela est agréable à Dieu aussi Ainsi tout ce qui se fait sera sûr et légitime.
IX, 1. Il est raisonnable de retrouver désormais notre bon sens, et, pendant que nous en avons encore le temps, de nous repentir pour retourner à Dieu. Il est bon de reconnaître Dieu et l'évêque. Celui qui honore l'évêque est honoré de Dieu ; celui qui fait quelque chose à l'insu de l'évêque sert le diable. (aux Smyrniotes)
Il, 1. Car quand vous vous soumettez à l'évêque comme à Jésus-Christ, je ne vous vois pas vivre selon les hommes, mais selon Jésus-Christ qui est mort pour vous, afin que, croyant à sa mort, vous échappiez à la mort. 2. Il est donc nécessaire, comme vous le faites, de ne rien faire sans l'évêque, mais de vous soumettre aussi au presbyterium, comme aux apôtres de Jésus-Christ notre espérance en qui nous serons trouvés si nous vivons ainsi. (aux Tralliens)
Dans sa lettre aux Éphésiens, il enseigne aussi l'importance de se réunir fréquemment pour prier.
"Que personne ne s'égare ; si quelqu'un n'est pas à l'intérieur du sanctuaire, il se prive " du pain de Dieu " (Jn 6, 33). Car si la prière de deux personnes ensemble a une telle force (cf. Mt 18, 20), combien plus celle de l'évêque et de toute l'Église. 3. Celui qui ne vient pas à la réunion commune, celui-là déjà fait l'orgueilleux et il s'est jugé lui-même, car il est écrit : " Dieu résiste aux orgueilleux ""
"XIII, 1. Ayez donc soin de vous réunir plus fréquemment pour rendre à Dieu actions de grâces et louange. Car quand vous vous rassemblez souvent, les puissances de Satan sont abattues et son oeuvre de ruine détruite par la concorde de votre foi. "
Voici d'autres belles pensées d'Ignace d'Antioche :
"ce n'est pas une oeuvre de persuasion que le christianisme, mais une oeuvre de puissance" (aux Romains)
"N'allez pas parler de Jésus-Christ, et désirer le monde". (aux Romains)
"Vos dépôts, ce sont vos oeuvres, afin que vous receviez comme il convient les sommes auxquelles vous avez droit." (à Polycarpe)
"Car notre Dieu, Jésus-Christ, a été porté dans le sein de Marie, selon l'économie divine, né de la race de David et de l'Esprit-Saint". (aux Éphésiens)
"vous vous réunissez dans une même foi, et en Jésus-Christ de la race de David selon la chair, fils de l'homme et fils de Dieu, --pour obéir à l'évêque et au presbyterium, dans une concorde sans tiraillements, rompant un même pain qui est remède d'immortalité, antidote pour ne pas mourir, mais pour vivre en Jésus-Christ pour toujours." (aux Éphésiens)
"Soyez pleinement convaincus de la naissance, et de la passion, et de la résurrection arrivée sous le gouvernement de Ponce Pilate. Toutes ces choses ont été véritablement et certainement accomplies par Jésus-Christ notre espérance ; puisse aucun de vous ne jamais se détourner d'elles." (aux Magnésiens)
"I, 1. Je rends grâces à Jésus-Christ Dieu, qui vous a rendus si sages. Je me suis aperçu, en effet, que vous êtes achevés dans une foi inébranlable, comme si vous étiez doués de chair et d'esprit à la croix de Jésus-Christ, et solidement établis dans la charité par le sang du Christ, fermement convaincus au sujet de notre Seigneur qui est véritablement de la race " de David selon la chair " (cf. Rm 1, 3), Fils de Dieu selon la volonté et la puissance de Dieu, véritablement né d'une vierge, baptisé par Jean " pour que ", par lui, " fût accomplie toute justice " (Mt 3, 15). 2. Il a été véritablement cloué pour nous dans sa chair sous Ponce Pilate et Hérode le tétrarque, -- c'est grâce au fruit de sa croix, et à sa passion divinement bienheureuse que nous, nous existons, --pour " lever son étendard " (Is 5, 26 s) dans les siècles par sa résurrection, et pour rassembler ses saints et ses fidèles, venus soit des Juifs soit des gentils, dans l'unique corps de son église.
II. Tout cela, il l'a souffert pour nous, pour que nous soyons sauvés. Et il a véritablement souffert, comme aussi il s'est véritablement ressuscité, non pas, comme disent certains incrédules, qu'il n'ait souffert qu'en apparence: eux-mêmes n'existent qu'en apparence, et il leur arrivera un sort conforme à leurs opinions, d'être sans corps et semblables aux démons." (aux Smyrniotes)
"VII, 1. Ils s'abstiennent de l'eucharistie et de la prière, parce qu'ils ne confessent pas que l'eucharistie est la chair de notre Sauveur Jésus-Christ, chair qui a souffert pour nos péchés, et que dans sa bonté le Père a ressuscitée. Ainsi ceux qui refusent le don de Dieu meurent dans leurs disputes. " (aux Smyrniotes)
"Aussi ai-je besoin de la douceur qui détruit le prince de ce monde." (aux Tralliens)
"Ne donnez pas de prétexte aux païens, pour que, par le fait de quelques insensés, la communauté de Dieu ne soit pas blasphémée. Car malheur à qui par sa légèreté fait blasphémer mon nom." (aux Tralliens)
"IX, 1. Soyez donc sourds quand on vous parle d'autre chose que de Jésus-Christ, de la race de David, fils de Marie, qui est véritablement né, qui a mangé et qui a bu, qui a été véritablement persécuté sous Ponce Pilate, qui a été véritablement crucifié, et est mort, aux regards du ciel, de la terre et des enfers, 2. qui est aussi véritablement ressuscité d'entre les morts. C'est son Père qui l'a ressuscité, et c'est lui aussi, le Père , qui à sa ressemblance nous ressuscitera en Jésus-Christ, nous qui croyons en lui, en dehors de qui nous n'avons pas la vie véritable." (aux Tralliens)
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