Les quatre principales positions sur le Repas du Seigneur
1° Transsubstantiation du pain et du vin dans le corps et le sang de Christ
La doctrine du Repas du Seigneur a occasionné une première discorde dans l'église au 9e siècle quand Radbertus, influencé par la recherche du mystérieux et du surnaturel propre à son époque, a enseigné qu'un miracle avait eu lieu lors des paroles prononcées au cours du repas du Seigneur. Les éléments s'étaient changés dans le vrai corps et le vrai sang de Christ. Ratrammus s'opposa à Radbertus. Ratrammus pensait comme Augustin pour qui la présence de Christ dans le repas du Seigneur était spirituelle. L'enseignement et la pratique de l'église se sont déplacés dans la direction de Radbertus pour développer une doctrine de la transsubstantiation ; c'est-à-dire que dans la Cène la substance dans les éléments du pain et du vin sont changés dans la substance du corps et du sang de Christ alors que l'apparence, la senteur et le toucher demeurent les mêmes.
Au 11e siècle, Berengar s'est opposé à l'idée courante que des morceaux de la chair de Christ soient mangés durant la Communion et qu'un peu de son sang soit bu. Faisant preuve de sensibilité, il a soutenu que tout le Christ est donné spirituellement quand le croyant alors qu'il reçoit le pain et le vin. Les éléments demeurent inchangés mais sont investis d'un nouveau sens; ils représentent le corps et le sans du Sauveur. Cette perception était cependant hors norme avec son époque, et la transsubstantiation fut déclarée la foi de l'église en 1059, même si le terme lui-même ne fut pas emploiyé officiellement avant le concile de 1215.
L'Église médiévale a continué à raffiner l'enseignement de la transsubstantiation, ajoutant des subtilités comme
- la concomitance, c'est-à-dire que le cors et le sang de Christ sont présents dans les deux éléments; ainsi quand la coupe n'est plus donnée aux laïques, le Christ au complet (son corps et son sang) est reçu dans le pain seulement.
- La consécration est une autre subtilité qui a été rajoutée. C'est l'enseignement que le moment le plus fort n'est pas la communion avec Christ mais le changement des éléments par leur consécration dans le coprs et le sang même de Christ.
- À cause de la présence réelle de Christ dans la Cène - corps, sang, âme, divinité - un sacrifice est offert à Dieu.
- Le sacrifice offert est propitiatoire.
- Les éléments consacrés peuvent être réservés à un usage ultérieur.
- Les éléments ainsi reçus devraient être vénérés comme étant le Christ vivant.
Le concile de Trente a confirmé ces enseignements ajoutant que la vénération donnée aux éléments consacrés est une adoration, la même que celle rendue à Dieu.
2° Martin Luther et la consubstantiation, la présence réelle du corps et du sang du Christ avec le pain et le vin
Les réformateurs se sont d'accord pour condamner la doctrine de la transsubstantiation. Ils soutiennent que c'est une erreur sérieuse qui est contraire aux Écritures, répugnante à la raison; contraire au témoignage des sens de la vue, de l'odorat, du goût et du toucher ; détruisant le vrai sens d'un sacrement et conduisant à la superstition et l'idolâtrie.
Pour Luther, c'est du vrai pain et du vrai vin, dans lesquels la vrai chair et le vrai sang de Christ sont présents sans transformation. Il rejette la transsubstantiation et le sacrifice de la Messe mais croit encore que le Christ est présent corporellement dans le Repas du Seigneur et que c'est son corps qui est reçu par ceux qui participent aux éléments. «Ceci est mon corps». Luther soutient que si l'Écriture ne peut être prise littéralement ici, elle ne peut être crue nulle part, et nous sommes en route vers «le déni virtuel de Christ, de Dieu et toutes choses».
3° Zwingli et le mémorial, un signe en l'absence du Christ physique ou spirituelle
Le principal opposant de Luther parmi les évangéliques était Ulrich Zwingli dont les activités réformatrices en Suisse étaient aussi vieilles que celles de Luther en Allemagne. Alors qu'il s'opposait autant à Rome que Luther, Zwingli avait été profondément influencé par l'humanisme de l'antiquité grecque, ce qui se traduisait par son aversion pour la mentalité médiévale et son adulation de la raison. Luther ressentait un attachement pour toute la tradition de l'église, était conservateur de nature et avait une profonde tendance mystique et était suspicieux de l'usage libre de la raison. Si Zwingli tolérait aisément Luther, l'inverse était tout le contraire. La différence principale entre les deux était leur compréhension de la Cène où Luther ne pouvait concevoir la présence de Christ autrement que physiquement alors que Zwingli était imprégné d'un dualisme profond : par exemple, église visible et église invisible.
Pour Zwingli aucun élément physique ne peut affecter l'âme, à part Dieu dans sa grâce souveraine. Ainsi donc, il ne doit y avoir aucune identifitcation du signe avec ce qu'il signifie, mais à travers le signe on s'élève au-dessus du monde des sens pour rejoindre la réalité spirituelle signifiée. En contraste, Luther soutenait que Dieu venait à nous préciséments dans les réalités physiques discernées par les sens.
Zwingli interprétait les paroles de Jésus «Ceci est mon corps» en hamronie avec Jean 6 où Jésus parlait de manger et boire son corps et son sang, surtout au v.63 «C'est l'Esprit qui vivifie, la chair ne sert à rien». Par conséquent, raisonnait-il, non seulement la transsubstantiation était une erreur mais la notion de consubstantiation de Luther aussi, selon laquelle Christ était d'une manière quelconque présent dans, sous et avec les éléments. La doctrine de manger Jésus physiquement est absurbe et répugnante au bon sens. De plus, Dieu ne nous demande pas de croire ce qui est contraire à l'expérience sensorielle. Le mot «est» dans la phrase «ceci est mon corps» veut dire «signifie» ou «représente», et doit être interprété allégoriquement, comme cela se fait avec les autres «Je suis» (ex. Je suis la porte Jn.10:9) dans la Bible. L'ascension de Christ signifie qu'il a enlevé son corps de la terre pour l'amener au ciel.
Ce qui a fait défaut à Zwingli, c'est qu'il n'a pas été en mesure de réaliser la réelle présence de Christ à la Cène par le Saint-Esprit non plus que ce soit une réelle nourriture spirituelle qui est donnée aux fidèles en Lui. Ce qu'il avait besoin pour une doctrine adéquate d'après M.E. Osterhaven, c'était la croyance de Luther dans la réalité de la communion avec Christ et Sa réception à ce Repas, comme on retrouve chez Calvin.
4° Jean Calvin et la présence virutelle, dynamique du Christ avec le pain et le vin
La perspective de Calvin sur le Repas du Seigneur semble être une position médiane entre celles de Luther et Zwingli, mais, en fait, elle est une position indépendante. Calvin a rejeté le «mémorialisme» de Zwingli et la «monstrueuse notion d'ubiquité» de Luther. Il soutenait qu'il y a une réelle réception de Christ à la Cène, seulement d'une manière spirituelle cependant. Le sacrement est un réel moyen de grâce, un canal par lequel Christ se communique lui-même à nous.
Avez Zwingli, Calvin soutenait qu'après l'ascension, Christ avait retenu son corps réel qui se trouve au ciel.
Avec Luther, Calvin croyait que les éléments dans le Repas du Seigneur sont des signes qui exhibent le fait que Christ est vraiment présent, et il répudiait la croyance de Zwingli que les éléments étaient des signes qui représentaient ce qui est absent.
«Si quelqu'un me demandait comment cette communion avec Christ avec les éléments a lieu, je ne serais pas honteux de confesser que c'est un secret trop grand pour que je le comprenne ou que mes paroles l'expriment.... Je préfère plutôt l'expérimenter que le comprendre.» - Institutions 4:17.32
En résumé
1° Transsubstantiation catholique: Ce qu'on voit sur la table du Seigneur est du pain et du vin mais quand la parole s'y ajoute ils deviennent le corps et le sang du Verbe (Jésus).
2° Consubstantiation de Luther: La substance du pain et du corps du Christ existent ensemble.
3° Présence virtuelle ou dynamique de Jean Calvin: par laquelle l'efficacité du corps et du sang du Christ est du ciel communiquée aux âmes des prédestinés.
4° Symbole d'Ulrich Zwingli : Repas purement commémoratif.
J'ai trouvé que la réflexion de Chibli Al-Chumayil, 1360-1417 était à propos:
«Le réformateur d'aujourd'hui devient un fardeau pour le réformateur de demain.»
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