Quand les mots sont les mêmes sans vouloir dire la même chose, c’est assez déroutant parfois
Salut mon beau !
Voilà comment je me suis souvent fait interpeler par de parfaits inconnus quand nous allions dans les marchés publics à Yaoundé, comme le marché central ci-dessous ou le marché Mokolo.
Ce n’est pas que je ne me trouve pas beau, loin de là (ne riez pas dans la salle) ! mais après l’avoir entendu à plusieurs reprises, je me suis mis à penser que c’était quelque chose différent de l’admiration… j’en étais venu à penser que ces gens voulaient me flatter pour que je m’intéresse à leur marchandise.
Finalement, j’en ai discuté avec ma belle – mais alors là, vraiment belle ! – gazelle des grassfields et elle m’a expliqué qu’en fait, les gens ne me disaient pas cela en rapport à ma beauté physique mais que c’était plutôt le raccourci de beau-frère puisque j’avais marié leur soeur camerounaise. Comme René Jackson Nkowa le faisait remarquer, le Cameroun c’est une grande famille !
Tout de même, dans les 8 semaines que j’ai passés au Cameroun, je suis le seul que j’ai entendu se faire interpeler par “mon beau”, j’en reviens donc à mon interprétation première, c’est parce que je le suis !!! :-d
Mon chéri, ma chérie.
Voilà des mots de tendresse que nous réservons seulement à l’élu(e) de notre coeur au Québec, mais j’ai appris que le champ sémantique de l’expression était beaucoup plus étendu au Cameroun. Après une courte phase de jalousie bien sentie – et… exprimée ! – ma femme s’est évertuée à m’expliquer qu’on appelait ainsi les gens intimes qu’on appréciait particulièrement sans qu’il y ait pour autant d’idylle amoureuse.
Sur la photo ci-dessous, à Winner’s Chapel, une des chéries de ma femme ! J’ai nommé le belle Sandy, propriétaire de la boutique Sandy Ethnik Design dans le quartier de Mimboman
Bon voilà ! Ma femme a plusieurs chéries et chéris et moi, j’en ai encore une seule ! Je me camerounise de plus en plus, oui, oui, mais comme je n’ai pas encore commencé à appeler personne d’autre “chéri(e)” que ma femme, il me faut un(e) volontaire. Qui veut être le premier CAMEROUNAIS – pas le premier québécois, on ne partira pas de cancans ! – ou … la première camerounaise !!! lol
On va parler un peu des patates… Ça m’a pris un peu de temps pour démêler tout cela !
Un jour, ma femme m’a parlé de prendre les pommes, j’avais beau chercher, je n’en voyais pas nulle part. Chez nous les pommes, ça pousse dans les arbres et ce sont des fruits. J’ai fini par comprendre qu’elle parlait des pommes de terre qu’on appelle plutôt communément au Québec “des patates”.
Ce qu’elle appelle “patate”, nous appelons cela plutôt “patate douce”.
Ma femme fait des super de bonnes pommes de terre frites (au Québec, on dit simplement des frites), impossible d’arrêter avant d’avoir tout mangé ! Chez nous, on y rajoute de la sauce brune chaude et du fromage en grain qui fond au contact de la sauce; certains auront peut-être reconnu la fameuse poutine, une invention culinaire toute québécoise, succulente mais pas facile à digérer.
Un jour ma femme me demande : “Arrête ma Bible dans le sac à main, stp”.
Je commençais à être habitué alors je me suis mis tout de suite en mode cogitation… et comme Champollion je suis parvenu à déchiffrer tout seul ce qu’elle voulait dire : “On s’en va à l’église, alors elle doit me demander de mettre sa Bible dans le sac à main, stp”
Au Québec, quand on arrête quelque chose c’est parce qu’elle est en marche, une automobile par exemple, on arrête pas un objet inerte !
Un jour, ma femme me dit : “On va faire laver des photos”.
“Bizarre cela, bon… voilà autre défi”, me dis-je, “j’ai comme l’impression qu’elle ne veut pas dire que les photos sont sales et ont besoin d’être lavées.”
Celle-là, je n’ai pas eu besoin de lui demander des explications, je l’ai trouvée tout seul, je suis fier de moi ! C’est sa manière de dire qu’elle veut faire développer des photos, j’imagine que cela pourrait avoir un rapport avec le fait qu’on plonge les photos dans le liquide pour les faire appaître.
Un jour, je l’entends demander à son neveu quelque chose du genre : “Aristote, va me chercher un gâteau, pardon!“
“Pourquoi lui demande-t-elle pardon ?” me dis-je. Ensuite, je vois Aristote arriver avec du pain. Je regarde sur l’emballage et je vois écrit “gâteau” . Je comprends alors que le pain au Cameroun c’est du gâteau et ce qu’ils appellent du pain, c’est ce qu’on appelle des baguettes de pain au Québec. Je te dis !
Concernant l’histoire de demander pardon, ma femme m’a expliqué qu’en fait, elle ne lui demandait pas pardon mais plutôt qu’elle se servait de ce terme comme un synonyme de “s’il te plaît”. Ah bon…
Un jour, ma femme me demande : “Donne-moi un plastique, stp”
Dans les oreilles d’un québécois, c’est très vague comme demande, je regardais autour de moi et je voyais du plastique partout dans l’appartement. Je l’ai fait répéter pour être certain d’avoir bien compris et j’ai finalement dû lui demander ce qu’elle entendait par “plastique”. J’ai alors compris : elle voulait que je lui donne un sac de plastique pour y placer quelque chose.
Lors de notre séjour à Dschang, ma femme m'a dit que le lit était malade.
Je l'ai fait répéter pour m'assurer que c'était bien ce qu'elle avait dit et effectivement c'était le cas. Alors j'ai fait fonctionner mes méninges et j'en ai conclu rapidement qu'elle voulait simplement dire que le lit n'était pas en bon état. Au Québec, seuls les êtres vivants peuvent tomber malades, jamais une chose.
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